Qu’est-ce qu’un délire en psychologie ?

Psychologista
9 Fév, 2024

En psychologie, les délires sont des croyances qui persistent malgré les preuves du contraire. Elles sont souvent associées à des maladies mentales telles que la schizophrénie, le trouble bipolaire ou la dépression grave. Les délires peuvent porter sur un large éventail de sujets et résistent au raisonnement logique ou aux preuves contradictoires.

Les personnes atteintes de délires peuvent croire qu’elles sont persécutées, surveillées ou contrôlées par des forces extérieures ou qu’elles ont des capacités ou des pouvoirs spéciaux. Ces croyances peuvent être pénibles et perturber la vie quotidienne. Le traitement peut inclure une thérapie et des médicaments pour gérer les symptômes et améliorer le bien-être général.

Les délires peuvent résulter d’une mauvaise interprétation des événements ou impliquer un certain niveau de paranoïa.

Les délires peuvent être bizarres ou non. Les délires bizarres se caractérisent par des croyances sur quelque chose qui ne peut jamais se produire, par exemple la croyance qu’une personne a été enlevée et clonée par des extraterrestres.

Les délires non bizarres, en revanche, sont des croyances qui pourraient être vraies, comme la croyance qu’une personne est traquée, que quelqu’un est amoureux d’elle ou que son conjoint la trompe.

Qu’est-ce que le trouble délirant ?

Le trouble délirant est un état caractérisé par des idées délirantes persistantes et non bizarres qui durent au moins un mois (Joseph & Siddiqui, 2023). Ces croyances altérant la réalité pourraient vraisemblablement se produire dans la vie réelle, mais restent fermement ancrées malgré les preuves du contraire. Contrairement aux hallucinations de la schizophrénie, aucun autre symptôme psychotique n’est présent.

Les personnes diagnostiquées avec un trouble délirant peuvent avoir des idées délirantes réalistes, comme croire qu’elles sont trompées ou conspirées, mais ces idées sont généralement très exagérées ou fausses.

Souvent, dans le cas d’un trouble délirant, la personne socialise et fonctionne selon les normes sociales et ne se comporte généralement pas de manière inhabituelle, ce qui rend cette affection difficile à reconnaître du point de vue d’une personne extérieure.

Le trouble délirant diffère donc d’autres troubles psychotiques avec délire, comme la schizophrénie, car d’autres symptômes de ces troubles peuvent affecter le fonctionnement de ces personnes.

Le trouble délirant touche environ 0,02 % de la population au cours de sa vie (Kalayasiri et al., 2019). Il apparaît souvent à l’âge moyen, avec un pic de prévalence entre 40 et 49 ans, bien qu’il existe des cas entre le jeune âge adulte et la vieillesse.

Certains types de délires présentent des différences entre les sexes, les délires érotomaniaques étant plus fréquents chez les femmes et les délires de persécution et de jalousie chez les hommes.

Types de délires

Le trouble délirant se caractérise par différents types d’idées délirantes.

types of delusions
Quelques types de délires

Le type de trouble délirant est basé sur le thème principal des idées délirantes ressenties.

Il est important de noter que les délires ci-dessous ne sont que quelques-uns des nombreux types qui existent et que les délires peuvent varier en intensité, en fréquence et en durée en fonction de l’individu et de ses circonstances spécifiques.

Erotomanie

Ce type de délire consiste à croire qu’une personne, généralement célèbre ou d’un statut social plus élevé, est amoureuse de l’individu. Par exemple, la personne qui souffre de ce délire peut croire que la personne célèbre lui communique des messages secrets dans l’émission de télévision dont elle est la vedette.

Ce type de délire s’accompagne souvent d’un comportement de harcèlement, car la personne peut tenter d’entrer en contact avec la personne qu’elle croit amoureuse d’elle.

Grandiose

Ce délire consiste à croire que l’individu a un sens exagéré de sa valeur, de ses connaissances, de sa richesse, de son talent, de son pouvoir ou de sa célébrité, malgré l’absence de preuves.

Les délires grandioses consistent à croire que l’individu a des pouvoirs spéciaux, des capacités ou une relation spéciale avec une divinité ou une célébrité.

Par exemple, une personne souffrant de délires grandioses peut croire qu’elle a fait une découverte importante ou qu’elle a été envoyée par une entité religieuse pour sauver le monde.

Persécution

Ce délire consiste à croire que la personne, ou un de ses proches, est espionnée, suivie, droguée, trompée ou maltraitée.

Elle peut croire que quelqu’un a l’intention de lui faire du mal ou de faire du mal à l’un de ses proches et peut donc se plaindre à plusieurs reprises aux autorités judiciaires.

Jalousie

Ce type de délire consiste à croire qu’un partenaire romantique ou un conjoint est infidèle, malgré l’absence de preuves.

La personne peut croire que son partenaire rencontre son amant secret lorsqu’il n’est pas en sa présence ou qu’il lui envoie des messages.

Somatique

Ce délire consiste à croire que l’individu éprouve des sensations physiques, des dysfonctionnements corporels ou qu’il souffre d’une affection médicale.

Par exemple, elle peut être convaincue d’être atteinte d’une maladie rare ou d’avoir des parasites sous la peau, alors qu’il n’y a aucune preuve de cela.

Mixte

Lorsque les délires ressentis ne relèvent pas d’une seule catégorie ou qu’il existe deux types de délires ou plus, on parle de délires mixtes ou de types de délires non spécifiés.

Causes et facteurs de risque

Bien qu’il n’existe actuellement aucune explication concrète des causes des délires, les chercheurs ont quelques idées sur les causes potentielles ou les facteurs de risque qui peuvent contribuer à l’apparition des délires.

La génétique

La génétique peut jouer un rôle dans l’apparition des délires, car il est plus fréquent que les personnes dont un membre de la famille souffre d’un trouble psychotique avec délire soient susceptibles de développer elles-mêmes des délires.

Par exemple, un parent atteint d’un trouble délirant ou de schizophrénie est plus susceptible d’avoir un enfant qui développe également l’une de ces pathologies.

Défauts sensoriels

Les troubles délirants sont plus fréquents chez les personnes souffrant de troubles de la vue ou de l’audition.

Si une personne a des problèmes de vision ou d’audition, elle peut être plus susceptible de se fier à des perceptions inexactes de la réalité si elle est moins capable de voir les choses telles qu’elles sont, bien que ce ne soit pas le cas pour la plupart des personnes souffrant de ces déficiences.

Cela ne veut pas dire que toutes les personnes souffrant de déficiences sensorielles auront des délires, et toutes les personnes souffrant de troubles délirants n’ont pas non plus de déficiences sensorielles.

Causes biologiques

Des causes biologiques peuvent également être à l’origine de l’apparition des délires. Joyce (2018) a étudié la pathobiologie des délires à l’aide d’études de cas de patients ayant subi un accident vasculaire cérébral.

Il s’est avéré que certaines des personnes ayant subi un AVC focal au niveau du cortex préfrontal latéral droit ont développé des idées délirantes. Cette partie du cerveau est connue pour avoir des connexions avec les ganglions de la base et le système limbique et pour recevoir des informations des neurones dopaminergiques du mésencéphale.

La dopamine est un neurotransmetteur qui joue un rôle dans la motivation, le plaisir et la récompense. Un dérèglement de la dopamine a été associé à la schizophrénie et aux personnes présentant un risque de psychose, ce qui suggère qu’une signalisation dopaminergique défectueuse pourrait être un précurseur de la formation d’illusions.

Une autre étude réalisée par Devinsky (2009) a mis en évidence des associations significatives entre le lobe frontal bilatéral et les délires dans l’hémisphère cérébral droit.

Une lésion de cette zone, une région du cerveau qui contrôle les perceptions et la pensée, peut entraîner une hyperactivité de l’hémisphère gauche. Les chercheurs ont suggéré que cela pouvait conduire les centres du langage gauche à « créer une histoire » qui ne peut être comparée à la réalité, corrigée et autocontrôlée en raison de l’atteinte du côté droit.

Cette histoire peut donc être confondue avec la réalité, et une résistance délirante peut se produire.

Facteurs environnementaux

Certains facteurs environnementaux peuvent contribuer au développement ou à l’exacerbation des délires,

  1. Les événements stressants de la vie : Les événements traumatisants ou stressants, tels que les abus, la violence ou les pertes, peuvent augmenter le risque de développer des idées délirantes.
  2. L’isolement social : Le manque de soutien social et l’isolement social peuvent contribuer au développement d’idées délirantes, car les personnes isolées socialement peuvent être plus enclines à la paranoïa et à la méfiance.
  3. Consommation d’alcool et de drogues : La consommation de substances, en particulier de drogues comme les amphétamines ou les hallucinogènes, peut déclencher des délires chez certaines personnes.

Il est important de noter que si ces facteurs environnementaux peuvent contribuer au développement des délires, ils n’en sont pas nécessairement la cause en soi.

Autres pathologies

Une étude menée par Nygaard, Sonne et Carlsson (2017) a révélé qu’un nombre important de personnes ayant développé un trouble de stress post-traumatique (TSPT) ont également développé des idées délirantes, en particulier de type persécutif.

Bien que ce ne soit pas le cas pour la plupart des personnes souffrant de SSPT, cela implique qu’il pourrait y avoir un lien de causalité entre le traumatisme et le stress et l’apparition de délires.

Outre le trouble délirant, les idées délirantes peuvent être un symptôme déclenché par un autre problème de santé mentale, par exemple :

  • La démence
  • Les troubles de l’humeur
  • La maladie de Parkinson
  • La schizophrénie
  • Psychose du post-partum
  • Trouble psychotique induit par une substance

Biais d’attribution

La recherche a également étudié les biais d’attribution en relation avec la formation et le maintien du délire (Humphreys & Barrowclough, 2010).

Il s’agit d’une tendance à faire des attributions internes pour les événements positifs (s’attribuer la causalité) et des attributions externes pour les événements négatifs (rejeter la faute sur des causes extérieures).

Des études ont montré que ce biais d’attribution exagéré et intéressé existe chez certaines personnes souffrant de délires de persécution, peut-être pour protéger l’estime de soi (Bentall, 2019).

Cependant, des recherches ultérieures remettent en question la question de savoir si ce biais est spécifique aux délires ou s’il fait partie de stratégies d’adaptation plus générales dans la psychose (Humphreys & Barrowclough, 2010).

Les revues soulignent également des incohérences dans les résultats, limitées par des problèmes liés aux mesures de style attributionnel utilisées dans les études (Zhu et al., 2017).

Si les biais d’attribution peuvent être liés aux délires de certains patients, les associations trouvées ne sont pas définitives. Il est nécessaire de poursuivre les recherches en examinant les tendances attributionnelles manifestes et cachées à l’aide d’une méthodologie solide.

La prise en compte des biais d’attribution pourrait encore éclairer les interventions, en aidant les patients à modifier leur style de raisonnement.

Comment gérer les délires

Considérations

Comprendre et traiter les délires peut être un processus difficile, en particulier si la personne qui en est victime ne reconnaît pas que ses croyances ne sont pas fondées sur la réalité.

Il est important de noter que certaines personnes souffrant de délires peuvent résister à l’idée de se faire soigner, ce qui rend le traitement initial difficile.

Lorsque les délires ne perturbent pas de manière significative la vie quotidienne, les personnes concernées peuvent ne pas penser qu’un traitement est nécessaire. Dans ce cas, une approche douce et encourageante de la part des proches peut être utile pour inciter la personne à se faire soigner, en particulier si ses idées délirantes la mettent en danger.

Dans l’ensemble, il est important d’aborder les personnes souffrant de délires avec compassion et compréhension, et de travailler en collaboration avec les professionnels de la santé mentale pour élaborer un plan de traitement qui contribue au mieux à leur bien-être.

Le traitement des délires peut faire appel à des médicaments et à la psychothérapie.

Les médicaments

Le principal type de médicament recommandé est l’antipsychotique. Ceux-ci ont montré leur efficacité en ce sens que de nombreuses personnes souffrant de délires et prenant des antipsychotiques ont constaté une amélioration partielle de leurs symptômes.

Les antipsychotiques typiques sont des médicaments utilisés pour bloquer les récepteurs de la dopamine dans le cerveau, une substance chimique que l’on croit impliquée dans le développement des idées délirantes.

Ils sont utilisés pour traiter les troubles mentaux depuis les années 1950 :

  • Chlorpromazine (Thorazine)
  • Fluphénazine (Prolixin)
  • Thiothixène (Navane)
  • Perphénazine (Trilafon)
  • Halopéridol (Haldol)
  • Trifluopérazine (Stelazine)

Les antipsychotiques atypiques sont un nouveau type de médicaments qui sont également utilisés pour traiter les troubles délirants, mais avec moins d’effets secondaires que les antipsychotiques typiques.

Ils agissent en bloquant les récepteurs de la dopamine et de la sérotonine dans le cerveau et semblent être plus efficaces pour traiter les symptômes des troubles délirants. Voici quelques-uns de ces médicaments

  • Clozapine (Clozaril)
  • Aripiprazole (Abilify)
  • Asénapine (Saphris)
  • Iloperidone (Fanapt)
  • Risperidone (Risperdal)
  • Olanzapine (Zyprexa)
  • Cariprazine (Vraylar)
  • Ziprasidone (Geodon)

Les antidépresseurs et les tranquillisants sont d’autres médicaments qui peuvent être utilisés pour traiter le trouble délirant.

Les antidépresseurs tels que les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) peuvent être utilisés pour traiter les sentiments de dépression ou d’anxiété qui accompagnent les idées délirantes.

Les tranquillisants peuvent être utilisés chez les personnes qui éprouvent des niveaux d’anxiété très élevés ou qui ont des difficultés à dormir en raison des idées délirantes.

Cependant, il faut être prudent avec les médicaments car ils ont tous des effets secondaires et ne doivent être utilisés que s’ils sont prescrits par un professionnel.

La psychothérapie

Enfin, la psychothérapie peut également s’avérer utile, en complément des médicaments ou seule, pour aider les personnes à gérer et à faire face au stress lié à leurs idées délirantes.

Il existe plusieurs types de psychothérapie qui peuvent être utilisés pour traiter les troubles délirants. En voici quelques exemples :

  1. Lathérapie cognitivo-comportementale (TCC): La TCC est un type de thérapie qui se concentre sur l’identification et la remise en question des schémas de pensée et des comportements inutiles. Dans le cas du trouble délirant, la TCC peut être efficace pour remettre en question et modifier les croyances délirantes de la personne (Sitko et al., 2020).
  2. Thérapie psychodynamique: La thérapie psychodynamique se concentre sur l’exploration et le traitement des schémas inconscients de pensée et de comportement. Dans le cas d’un trouble délirant, la thérapie psychodynamique peut être utilisée pour explorer les facteurs émotionnels et psychologiques sous-jacents qui contribuent à l’apparition et au maintien des idées délirantes.
  3. Thérapie familiale: La thérapie familiale consiste à travailler avec l’individu et les membres de sa famille pour aborder les dynamiques interpersonnelles et les modes de communication qui peuvent contribuer aux délires de l’individu.
  4. Thérapiede groupe: La thérapie de groupe consiste à travailler avec un groupe d’individus qui ont des expériences ou des défis similaires. Dans le cas d’un trouble délirant, la thérapie de groupe peut fournir un environnement de soutien et de validation permettant aux individus d’explorer et de traiter leurs expériences.
  5. Lathérapie d’acceptation et d’engagement (ACT) : elle utilise des stratégies d’acceptation et de pleine conscience ainsi que des processus d’engagement et de changement de comportement afin d’accroître la flexibilité psychologique. La recherche a montré que l’ACT est efficace dans la gestion des symptômes psychotiques (Burhan & Karadere, 2021).

Il est important de noter que le type de thérapie le plus efficace pour le trouble délirant peut varier en fonction de l’individu, de ses besoins spécifiques et de sa situation. Un professionnel de la santé mentale peut travailler avec l’individu pour élaborer un plan de traitement personnalisé qui favorise au mieux son bien-être.

Les techniques d’adaptation aux délires

Outre la thérapie formelle, l’acquisition de compétences d’adaptation peut aider les personnes aux prises avec des idées délirantes à gérer les symptômes difficiles.

Parmi les compétences utiles, citons la pleine conscience pour s’ancrer dans le présent, les tactiques de régulation des émotions comme la respiration profonde, l’équilibre entre les activités agréables, la mise en place d’un plan de sécurité en cas d’aggravation des délires, les groupes de soutien par les pairs pour réduire l’isolement, le recours à des proches pour tester la réalité, les soins personnels par le biais de routines saines et la pratique de l’autocompassion.

Si les délires persistent, le fait de se doter d’une boîte à outils d’adaptation peut atténuer les perturbations et la détresse qu’ils entraînent.

La pleine conscience vous aide à rester ancré dans le moment présent lorsque les délires menacent de vous submerger. La prise en charge de soi apporte de la stabilité lorsque les symptômes fluctuent. La recherche suggère que les interventions basées sur la pleine conscience peuvent réduire les symptômes délirants chez certaines personnes (Ellett, 2023).

Le soutien des pairs réduit les sentiments de solitude et d’aliénation. Les proches peuvent fournir des commentaires objectifs sans porter de jugement.

Avec le temps et la pratique, ces compétences deviennent des ressources précieuses pour la résilience tout au long de la vie. Même si les délires persistent, les stratégies d’adaptation permettent de donner un sens à sa vie malgré les difficultés.

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